16/08/2016
La sécurité routière à Decazeville
Pour avoir une situation précise de l’accidentologie sur notre ville, il conviendrait de se baser sur les données établies par les procès-verbaux de la police nationale. Données que je n’ai malheureusement pas. C’est donc à la lecture d’articles de ces dernières années tirés de la presse quotidienne régionale dont vous avez quelques extraits ci-dessous et des points presse annuels de la zone de police, que je vais essayer de tirer quelques enseignements de l’accidentologie sur la voirie sur notre ville et voir quelles mesures il serait intéressant de prendre pour y améliorer la sécurité routière.
Les accidents touchent tous les modes de mobilité, mais je note tout de même une proportion significative d’accidents impliquant des piétons ou des deux roues motorisés. Les causes de tous ces accidents semblent diverses : moment d’inattention, imprudence, alcoolisme… mais la vitesse excessive semble être une des causes importantes.
Il est important de rappeler que plus la vitesse d'un véhicule est rapide, plus le champ de vision de son conducteur est réduit et plus la distance de réaction et de freinage est longue. La vitesse a également une forte responsabilité dans la gravité des blessures, surtout pour les accidents impliquant des piétons.
Rappelons que le risque d’un piéton d’être tué dans une collision avec une voiture est fonction de la vitesse de l’impact. En cas d’accident, les chances de survie d’un piéton sont huit fois plus élevées à 30 Km/h qu’à 50 Km/h et deux fois plus élevées à 20 Km/h qu’à 30 Km/h (Voir graphique ci-contre – Source Certu).
La sécurité routière est un des domaines touchant à la mobilité qui me préoccupe depuis longtemps. Le problème de la sécurité routière sur Decazeville avait déjà été soulevé lors de l’élaboration du Plan Global de Déplacements du Bassin en 2006.
Les véhicules motorisés sont de plus en plus puissants, la population locale est vieillissante et donc plus vulnérable, les modes actifs (vélo, marche à pied) se développent, la physionomie des rues de la ville a très peu évoluée si ce n’est la rue Gambetta et une partie de la rue Cayrade, et la circulation motorisée à Decazeville est parfois aussi anarchique que dans les années 80 ou la RN 140 traversait la ville.
Les modes de mobilités ont fortement évolué partout en France et les règlements et aménagements urbains se sont adaptés à cette évolution. Malheureusement, à part la mise en service du TUB en 2008, cette évolution n’a semble-t-il pas encore touché Decazeville et le Bassin en général.
Le Plan Global de Déplacements du Bassin de 2006 esquissait pourtant les grandes lignes pour “ Maîtriser la circulation automobile par un meilleur fonctionnement de la voirie et de la sécurité routière sur le Bassin “
Cela passait par deux actions principales : établir une hiérarchisation de la voirie sur le Bassin et aménager une zone 30 dans le centre-ville de Decazeville, mais aussi par la création d’un réseau pour les vélos et enfin par des actions vers les piétons et les personnes à mobilité réduite.
Le Plan Global de Déplacement du Bassin prévoyait de réaliser rapidement une étude concrète et les réalisations financées par la commune devaient débuter dès 2008.
A mon grand regret, pas grand chose n’a bougé depuis 2006.
Seul un Schéma Modes Doux a été réalisé en 2010… qui n’a été suivi que par très peu de réalisations.
Hiérarchisation de la voirie :
La hiérarchisation de la voirie est un moyen de représenter un réseau de voies à partir de plusieurs critères préalablement définis. Ces critères sont multiples. Ils peuvent être :
- par catégories de maitres d’ouvrage de ces routes : route nationale, départementale ou communale,
- par fonction : classe de trafic, de vitesse, type de liaison…
Cette hiérarchisation servira ensuite lors de la programmation des aménagements à laquelle elle sert de référence.
Elle permet ainsi d’obtenir des gains en termes de sécurité, par une plus grande cohérence entre classes de voies et donc par une meilleure lisibilité du réseau pour les usagers.
Les Zones de Circulation Apaisées :
La législation, les règlements, les aménagements et les pratiques évoluent vers une cohabitation de tous les modes de mobilités en ville. Pour cela le Code de la route évolue en zone urbaine vers la démarche Code de la rue, démarche qui vient de Belgique et qui été étendue en France grâce au Décret 2008-754 du 30 juillet 2008. Le principe de prudence des conducteurs à l’égard des usagers les plus vulnérables y est acté (Article R412-6 du Code de la route).
J’ai évoqué dans une récente note l’évolution de la législation et des règlement concernant les modes actifs, vélo et marche à pied, étape importante pour favoriser ces modes de mobilité économiques que tout le monde peut pratiquer.
Il existe trois modèles de ZCA (Zone de Circulation Apaisée) : la zone 30, la zone de rencontre et l’aire piétonne.
Les Zones de Circulation Apaisées entendent donc favoriser la cohabitation de tous les modes de mobilité pour une meilleure sécurité de tous, notamment des usagers de la voirie les plus vulnérables (cyclistes et piétons).
Il est à noter que cette cohabitation de tous les modes de mobilités fait également économiser de l’argent aux collectivités lors des aménagements de voiries. Plus besoin de faire de gros aménagements pour les piétons et les cyclistes. Une signalétique verticale et horizontale ainsi que quelques légers aménagements appropriés pour apaiser la vitesse des véhicules motorisés (ralentisseurs, chicanes…) suffisent maintenant pour avoir des villes accessibles à ces usagers en toute sécurité, pour peu que l’on en ait la volonté.
Il reste bien sûr à réaliser sur la voirie et l’espace public les indispensables aménagements pour permettre les déplacements des personnes à mobilité réduite.
Zone 30 :
Il convient d’abord de faire une différence entre « zone 30 » et « voie limitée à 30 Km/h ». Le tableau ci-dessous extrait d’un guide du Cerema (ex Certu) l’explique très bien.
La zone 30 est un espace public affecté à la circulation de tous les usagers où on cherche à instaurer un équilibre entre les pratiques de la vie locale et la fonction de circulation. Les doubles-sens cyclables y sont généralisés comme pour les rues à sens unique à 30 Km/h depuis le 1er janvier 2016. Des études démontrent que les doubles-sens cyclables contribuent à une modération de la vitesse des usagers motorisés et donc à une meilleure sécurité routière. La mise en place des doubles sens cyclables sur 215 Km de rues à sens unique à Paris depuis 2008 n’a pas augmenté le nombre d’accidents impliquant notamment des cyclistes ou des piétons.
Les piétons ne sont pas prioritaires en zone 30.
Des aménagements modérateurs de vitesse et de traversée des piétons sont généralement combinés.
La signalisation y est minimale, juste des panneaux aux entrées et sorties de cette zone et éventuellement une signalisation au sol (voir ci-dessous le schéma d’une rue à sens unique en fin de zone 30).
La zone de rencontre :
Dans les zones de rencontre, la priorité est donnée aux piétons, mais la circulation automobile n’y est pas interdite. Elle est limitée à 20 Km/h. La circulation est à double sens pour les cyclistes. Le stationnement y est autorisé uniquement sur des emplacements matérialisés. Afin d’améliorer la perception de la fonction de la voie, il est possible d’ajouter à la signalisation réglementaire un marquage d’animation sur la voirie.
Il faut noter que des zones de rencontre existent déjà sur notre territoire. La commune de Viviez en a instaurée une devant l’école de Viviez-Pont sur l’avenue Adam Grange. Cette rue est à double sens.
La commune de Flagnac a également instaurée une zone de rencontre dans la traversée du bourg. La rue est en grande partie en sens unique et les vélos ont donc la possibilité de circuler dans les deux sens.
Ci-dessous, le schéma montre le principe de fonctionnement d’une zone de rencontre. A noter le marquage d’animation (ici cercles colorés) pour bien marquer la fonction de cette voirie et inciter les véhicules motorisés à la prudence.
L’aire piétonne :
La priorité est au piéton qui circule sur la chaussée. L’accès aux véhicules motorisés est limité sur autorisation liée à la desserte et en circulant au pas. Les vélos y sont admis dans les deux sens, sans gêner les piétons. Le stationnement est interdit aux véhicules motorisés.
Toutes les Zones de Circulation Apaisée doivent bien sûr faire l’objet d’une communication importante des collectivités qui les mettent en place, notamment pour les rues commerçantes. Il est d’ailleurs important d’impliquer les commerçants pour la réussite de ces aménagements dont ils seront les premiers bénéficiaires avec les riverains qui habitent ces rues : sécurité routière améliorée, accessibilité aux commerces facilitée, plus de chalands, plus de convivialité, moins de bruit, meilleure qualité de l’air…
Quelle pourrait être la configuration à Decazeville :
La priorité serait de mettre en place les mesures préconisées dans le Plan Global de Déplacement du Bassin de 2006 : établir une hiérarchisation de la voirie et créer une zone 30 dans le centre-ville de Decazeville.
Vous avez sur la carte ci-dessous les rues qui pourraient éventuellement bénéficier de cette zone 30 (en bleu foncé). On peut noter que certaines rues ou tronçons de rue de cette zone sont déjà limités à 30 Km/h.
Cette zone 30 pourrait être complétée par une zone de rencontre sur le tronçon de la rue Cayrade récemment rénové (en orange sur la carte) afin d’y favoriser notamment la fréquentation et la sécurité des clients des commerces.
Enfin, pourquoi ne pas établir par la suite une deuxième zone 30 au nord de la RD 840 afin de sécuriser les voies venant du lycée de l’hôpital et de la cité de Trépalou. Beaucoup de rues sont d’ailleurs là aussi déjà limitées à 30 Km/h sur ce secteur.
Lors de la dernière réunion de la commission “ Transport et mobilité “ de la Communauté de communes en mai dernier, il a été évoqué la réactualisation du Plan Global de Déplacements grâce à un appel à projet de l’ADEME qui financerait 50 % des études. Le périmètre de cette étude serait élargi aux communes de la Vallée du Lot afin d’anticiper la future communauté de communes. Voilà une bonne initiative… à condition que cette future étude ne finisse pas au fond d’un tiroir comme l’a été en partie celle de 2006.
Photos : cliquez sur les photos pour les agrandir
Photos : 1, 4 (avec Midi Libre), 12, 13, 17 (avec OpenStreetMap) - jlc – Licence Créative Commons
Photo 2 : extraits d'articles de La Dépêche du Midi et Centre-Presse
Photos : 3, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 14, 15, 16 – Cerema – Certu
Photo 5 : Communauté de communes du Bassin Decazeville-Aubin (PGD)
15:57 Publié dans Développement durable, Environnement, Politique locale, Transports et mobilité | Lien permanent | Commentaires (0) | | Facebook | | Imprimer |
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